Qui ? : Corentin Capo
Où ? : Garches, Hôpital Raymond Poincaré
Quand ? : Septembre 2009
Pourquoi ? : Association LOL Project
Comment ? : Quitte à choisir, mieux vaut en rire.
Corentin, tu as accroché un soleil permanent au ciel de ma vie, un tatouage de bonheur que je brandis à l’intention de tous les gens aigris. En arrivant pour ma première séance LOL à l’hôpital Raymond Poincaré à Garches, en service d’oncologie pédiatrique, j’ai soudain paniqué, un peu. Un peu d’appréhension pour ce monde si secret de la douleur humaine, un peu paniqué de crainte de me louper, de ne pas être à la hauteur des espoirs des gamins arrivés là, ni de l’attente des équipes soignantes. Le LOL Project faisait du bien aux gens « bien-portants », ça je le savais pour l’avoir expérimenté. Mais là, à la demande de la doctoresse Nicole Delépine, j’apportais mon anti-protocole médical, celui du rire, celui du désir de rires, peut-être celui du plaisir d’en rire. Je n’ai pas de mantra contre le trac, pas de fétiche, au mieux je suis une pellicule pas encore exposée, un film en attente du monde. Et toi Corentin, tu m’as révélé un aspect de ce que je suis. Nous avons ensemble expérimenté la chimie d’une expérience inédite pour moi, celle du rire médecin, une alchimie délicate pour adoucir l’enfer de ta maladie. Quelques heures plus tôt, m’as-tu dit, tu étais en chimiothérapie. Quel drôle de destin m’a fait croiser ton chemin ? D’où me venait cette audace de croire qu’une séance de photos pouvait t’aider à combattre ? Qu’allions nous bien pouvoir faire de ce fonds blanc, neutre et clinique, alors que, je le voyais dans tes yeux, tu souffrais encore ? Alors nous avons joué, toi et moi, à la vie qui dure, à se voir beau, à être comme tous ces gens hors ces murs, à oublier les soins, à oublier le mot « fin ». Le jeu c’est très sérieux. Tous les enfants sont sincères lorsqu’ils jouent à demain. J’ai attendu que tu réveilles le soleil endormi tout au fonds de toi, qu’il jaillisse en un éclair de joie pure. Et là, à cet instant précis, j’ai vu un gosse armé d’un simple éclat de rire tenir en respect la plus terrible des maladies.
Extrait du livre « Trait pour traits » en préparation avec Nicolas Gouzy
