Où ? : A son domicile parisien
Quand ? : juillet 2013
Pourquoi ? : Calendrier pour la Ligue contre le cancer
Comment ? : Avec une bûche au chocolat
« Montez, mes petits » Et déjà la voix, (ah cette voix !) nous happe et nous emporte dans une histoire de Winnie l’Ourson. « Mais ??? Il est noir !! » Fait il mine de s’inquiéter, rigolard, malicieux, jouant la surprise lorsqu’il découvre Toky mon assistant malgache. Puis, de nouveau, un éclat de rire. Quand Monsieur Rochefort rit le monde devient plus beau, quand il parle, le monde devient meilleur.
Nous montons le matériel pour une séance de prise de vues dans sa chambre. A 83 ans, l’oeil pétillant de curiosité, il observe ce déballage technique envahir son espace intime. Heureusement les cinq mètres sous plafond de son appartement tempèrent un peu cette invasion.
Je n’ai pas pour habitude de bouder mes plaisirs ; rencontrer Jean Rochefort en est un. Il est tout à moi pour quelques minutes ; nous allons travailler ensemble au profit de la Ligue contre le cancer. Un bonheur rare, unique. J’y vais par petites touches… Diriger Monsieur Jean Rochefort, moi ? Dès qu’il écarquille les yeux, son regard vous envahit. Dès qu’il vous propose une mimique, un geste, une attitude, tout est juste, placé, exact. Dès qu’il sourit, vous tombez sous son charme. Mais il y a comme une fragilité, une angoisse dans cette maîtrise. Il a ce talent rare de ne jamais se prendre au sérieux et pourtant on sent de la gravité chez ce gentleman du rire. Il veut nous plaire à tous, me séduire, presque trop.
J’aime me nourrir des autres, lui aussi. Il aime restituer ce qu’il a compris du monde, des gens. C’est un mime aimant ; il capte, il capture, il captive. C’est un artiste du don jouant d’une palette d’acteur généreuse et superbe. Sa plus belle conquête c’est son public du moment. Il attend, il guette même votre plaisir à le voir jouer, comme une preuve de vie, pour lui, pour moi, pour nous.
Dès que Jean Rochefort nous a ouvert la porte de son chez-lui, sa voix envoûtante, son visage souriant, sa moustache légendaire, ses yeux malicieux, son élégance nonchalante de dandy, tout m’a paru familier. On aurait vite fait d’épuiser les superlatifs pour le décrire. Une demi-heure de ravissement enfantin, un vrai moment de gourmandise, ponctué de ses éclats de rire enchanteurs.
Comment ne pas être heureux de l’avoir rencontré ?
Nous avons tous droit à un gros câlin d’au-revoir chaleureux, sincère. C’est comme serrer dans ses bras le meilleur du cinéma et du théâtre français, une légende vivante qui vous redonne une âme d’enfant, un après-midi de juillet dans la Forêt des Rêves bleus.
En collaboration avec Nicolas Gouzy